TH5: Chapitre 8 : le principe de prévention

1. La prévention du risque par son anticipation

A. Les risques technologiques et environnementaux

À l’origine de la prise de conscience de l’importance de la prévention, il y a des accidents industriels aux conséquences néfastes pour l’environnement et pour les populations : accident d’industrie chimique de l’usine italienne de Seveso en 1976, explosion de l’usine nucléaire russe de Tchernobyl en 1986, explosion de l’usine française AZF à Toulouse en 2001. Tous ces événements ont fait prendre conscience de la nécessité de légiférer pour prévenir d’autres catastrophes similaires.
En matière de prévention des risques technologique et environnemental, les textes de droit communautaire ont précédé et influencé le droit national. Les deux directives dites « Seveso » ont été transposées dans le droit interne français et des lois nationales ont fait de la prévention de ces risques une référence aussi pertinente que celle de la prévention du risque naturel ou du risque de nature terroriste. Ainsi, sont aujourd’hui réglementés les modalités d’implantation des centres industriels, les dispositifs d’installation des entreprises potentiellement dangereuses pour les personnes ou pour l’environnement, ou encore l’information des riverains et la sensibilisation des partenaires de ces entreprises.

B. Les risques au travail

Dans le monde du travail, la volonté de faire reculer le nombre d’accidents et de maladies professionnelles prend également appui sur le principe de prévention. Les instances européennes ont joué un rôle majeur dans la promotion du principe de prévention dans l’entreprise. D’une part, une cinquantaine de directives ont été adoptées, dont les dispositions précises permettent de résoudre des problèmes ou des risques propres à certaines activités professionnelles. D’autre part, le droit communautaire a élaboré une directive de portée générale, qui pose le principe de l’obligation de prévention pour tout employeur. Cette obligation s’applique à toutes les entreprises et bénéficie à tous les salariés.

Le droit interne met à la charge de l’employeur une obligation de résultat de sécurité : en cas de problème de sécurité pour son personnel, il ne saurait donc échapper à sa responsabilité sous prétexte qu’il n’a commis aucune faute ; de là, la primauté de la prévention des risques dans le monde du travail.

C. La méthodologie de la prévention entreprise

Pour favoriser l’application du principe de prévention, la réglementation française impose à tout chef d’entreprise employant au moins un salarié d’élaborer chaque année un Document unique d’évaluation des risques (DUER). Cet outil d’analyse permet de recenser, de façon précise et pour tous les postes de travail, les causes d’accidents potentiels.

Son contenu fait l’objet d’une diffusion à tous les salariés et, hormis dans les entreprises de moins de 11 salariés, il doit être mis à jour chaque année. Si l’obligation du DUER a été généralisée, c’est que, dans chaque entreprise, il peut y avoir des risques particuliers. Seule l’étude de ces spécificités permet de les supprimer en les combattant à la source.

Évaluer les risques au travail doit générer des mesures de protection : soit des mesures de protection individuelles pour certains postes aux risques particuliers (port de chaussures de sécurité, formation à l’utilisation d’outils dangereux, etc.), soit des mesures de protection collectives pour sécuriser l’ensemble du personnel (aménagement des locaux, changement d’un carrelage glissant, information sur les risques liés à l’activité de l’entreprise ou aux produits utilisés, etc.).

D. L’engagement de l’État

Conscient de la gravité du problème des risques professionnels, l’État a mis en place plusieurs dispositifs destinés à favoriser la préservation de la santé des salariés.
  • Pour les entreprises et organisations de dimension modeste (moins de 250 salariés) ou aux ressources limitées, les aménagements pour la sécurité du personnel peuvent apparaître comme des dépenses improductives et non prioritaires. Afin de favoriser les initiatives de prévention des risques dans ces entreprises, l’État a créé un Fonds pour l’amélioration des conditions de travail (FACT), qui peut leur apporter une aide financière. 
  • L’action de l’État se développe également dans le domaine de la formation à la sécurité, au travers de l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS). L’INRS organise des stages destinés principalement aux professionnels de la santé au travail et aux salariés qui participent à la prévention des risques, du fait de leurs fonctions au sein du CHSCT. Ces périodes de formation leur permettent d’acquérir ou d’actualiser leurs connaissances sur les dangers au travail, ainsi que les méthodes d’identification et de prévention de ces risques. 
  • Ponctuellement, l’État ne s’interdit pas d’intervenir lorsqu’il constate l’explosion d’un danger particulier : ainsi, les suicides de plus en plus nombreux dans des grandes entreprises ont-ils justifié la mise en place d’un plan d’urgence pour favoriser des accords d’entreprise destinés à faire reculer ce risque lié aux conditions de travail dans les très grandes structures (plus de 1 000 salariés). 

2. L’évolution de la notion de santé du salarié

A. Les différents aspects de la santé

Protéger la santé du salarié consiste d’abord à lutter contre les causes d’accidents du travail et de maladies professionnelles atteignant la santé physique. Cependant, la notion de santé du travailleur s’est élargie.
  • D’une part, la législation et les juges prennent en compte le harcèlement moral : celui-ci peut résulter soit d’un déclassement arbitraire du salarié, soit de mesures le pénalisant du point de vue financier, soit encore d’une succession d’agressions verbales. La santé mentale du salarié en est souvent affectée ; il sombre parfois dans la dépression nerveuse.
  • D’autre part, on reconnaît aujourd’hui qu’il existe des troubles psychosociaux en relation avec le travail : ces troubles sont la conséquence du stress au travail et affectent la psychologie et le comportement du salarié. Ils peuvent prendre des formes diverses : apparition d’un état dépressif, angoisses et troubles de l’adaptation (agressivité, irritabilité). 
La prise de conscience de la gravité de ces troubles psychosociaux montre bien que le salarié est aujourd’hui considéré d’une façon globale. Prévenir ces nouveaux risques passe par la remise en cause de certains styles de management, parfois peu soucieux de la personne des subordonnés.

B. Le rôle des instances de protection de la santé

La prévention des risques au travail est facilitée par l’intervention de diverses instances dont le rôle est de protéger la santé des salariés.

L’inspecteur du travail : fait respecter la réglementation relative à l’hygiène et à la sécurité. Il peut user de sanctions en cas de manquement de la part du chef d’entreprise : mise en demeure, procès-verbal, action en référé devant le juge en cas d’urgence, etc.

Le médecin du travail fait passer une visite médicale au salarié et opère également une surveillance médicale particulière dans des situations à risque. Il veille aussi à ce que le lieu de travail soit conforme aux règles d’hygiène et de sécurité.

Le Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) est l’organe qui réunit certains représentants du personnel et l’employeur pour développer la protection de la santé des salariés et promouvoir des améliorations des conditions de travail.

C. La situation de danger grave

La loi précise qu’un salarié confronté à un danger grave et imminent dispose d’un droit d’alerte et d’un droit de retrait. Pour le premier, il s’agit de prévenir l’employeur du danger présenté par la situation de travail. Pour le second, il s’agit de se retirer de la situation dangereuse pour préserver sa personne. Le danger est grave lorsqu’il est raisonnable de penser qu’il fait courir un risque pour la santé ou même pour la vie ; il est imminent lorsqu’il apparaît impossible de prendre des mesures immédiates pour pallier les risques encourus.

Dès lors que ces caractéristiques sont vérifiées, l’employeur ne peut pas s’opposer à l’exercice du droit de retrait, ni le sanctionner. La jurisprudence fait de cette prérogative du salarié une règle d’ordre public : les sources inférieures du droit social, comme le règlement intérieur de l’entreprise, ne peuvent ni l’écarter ni la restreindre dans son application.

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